Nouvelle

                  PRIX DU JEUNE ECRIVAIN FRANCOPHONE

 

 

                                  EDITION  2007-2008

                                                                 ROMAN

TITRE : UN ALLER SIMPLE POUR DAKAR.              

 

AUTEUR : Abdoul Koudous AHMED SAIDOU

Etudiant en Licence de GEOGRAPHIE à l’Université d’Abomey-Calavi.

Adresse : 04BP 1501 Cadjèhoun Cotonou

               BENIN.

                Tél. :(229)97166827

              E-mail :ahmed_koudouss@yahoo.fr

 

                     


Je veux juste partir…..

 

Encore un nouveau jour qui se lève ;

Celui d’avant a cru pouvoir emporter mes rêves ;

Mais elles ont survécu et sont restés les mêmes.

Ni la fureur de l’Atlantique, ni les sauvetages in extremis, ni les rapatriements chaotiques n’ont réussi à me faire signer la trêve.

Comment veux-tu qu’il en soit autrement alors qu’ici, le temps semble s’être arrêté.

Alors que sortir de la fac, j’ai du repointé à la cité ;

Alors que je vis chaque jour comme le dernier ;

Destiné à rester en bas de la société ;

Résigné à subir la misère avec fierté.

Alors tu comprends que partir pour moi c’est une nécessité.

Parce que j’en ai marre ; parce que je refuse de me battre pour le minima ; parce que j’ai peur de mourir dans l’anonymat.

Partir pour ne plus souffrir ;

Partir pour survivre ;

Défier la mort pour pouvoir espérer ;

Navigué vers l’horizon lointain à la recherche de la dignité.

Croire en mes rêves parce que les anges m’accompagnent.

Il n’y aura pas du champagne. Juste la Catalogne. Mais c’est tout de même l’Espagne.

 

                                  Texte de Slam déclamé par Sayeed DARA au CCF de Cotonou lors d’un concours de Slam.

 

 

                                                Au commencement, il y a des mecs qui, fatigués de jouer le rôle de figurants que le réel a bien voulu leur offrir malgré eux, décident de prendre les choses en main pour changer le cours de l’histoire. Miser ce qu’ils ont de plus cher, leur vie, sur ce qu’ils espèrent avoir de plus digne, le bonheur. Ereintés par des années de souffrance et de misère, venus d’horizons aussi divers que les causes du terrorisme international, ils ont fini par acquérir un destin commun, un nom commun. La mort anonyme sur les océans, les rapatriements par masses, et au meilleur des cas une vie précaire dans l’anonymat le plus total. D’une manière ou d’une autre, leur aventure se termine toujours par l’une des ces trois alternatives à quelques différences près. Et pourtant, ils n’aspirent qu’au bonheur. Celui-là même qu’un mec ou un groupe de mec, je ne m’en souviens plus tellement, a un jour de Décembre 48, eu le bonheur de proclamer à travers la déclaration universelle des droits de l’homme. Ils ne comprennent pas pour quelle raison on leur refuse l’accès au temple du bonheur, pourtant légitime. Parce qu’un groupe de tarés aux compétences et aux mœurs douteux ont pris l’espoir en otage, parce que le temps lassé de  toujours recommencer son décompte normal dans un paysage qui a tout  perdu de sa normalité,  ils là où l’espoir est permis, là où le bonheur est à portée de main pour tous.  C’est du moins le telling qu’ils se construisent. Mais c’est sans compter qu’à l’arrivée, se trouve un pays avec tout ce qu’il y a de problèmes liés au chômage,à l’insécurité,le pouvoir d’achat,la croissance…et toutes ces choses qui n’ont jamais mérité la moindre attention dans leur pays d’origine. À première vue on pourrait croire que l’intégration aurait été leur mal numéro un, mais c’est plutôt l’hostilité  du pays d’accueil qui leur tombe dessus. Il leur faut supporter cette image de non sollicités, d’envahisseurs, de voleurs de travail et d’agitateurs extérieurs. Venus de loin, ils y auraient fait entrer en même temps qu’eux-mêmes les malédictions de leur camp de malheur. Alors personne ne veut d’eux. Ils ne sont pas les bienvenus. Les pays d’accueil s’en préviennent à coup de législations sévères et non humaines. Ils font la une malgré eux pendant les campagnes électorales. Lorsque les banlieues Françaises flambent, ils sont montrés du doigt. Le terrorisme frappe les Pays-bas, ils sont recherchés. C’est à croire qu’ils portent la poisse ! Mais rien de tout ce qui se dit sur cette nouvelle race de « chasseurs d’espoir », ne semble entamer leur détermination à réaliser leur rêve, celui pour lequel ils se disent destiner…

 

 

 

 

 

                                               

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                                           Le jour se lève sur la grisaille récurrente, héritage de l’été pourri qui s’est installé sur cette ville de Provence depuis le mois de Juillet. Quelque part dans un centre de rétention, un homme angoissé, fatigué de s’interrogé sur ce que sera son sort, attend. Il espère que l’arrivée de son avocat mettra fin à vie d’homme tourmenté que le mois de rétention a fait de lui. Il espère que son avocat confirmera ce que l’officier de Police judiciaire lui a annoncé un jour plus tôt. Plusieurs fois reporté, ou plutôt jamais programmé, il espère que son avocat viendra lui dire qu’il ira au tribunal aujourd’hui. Car oui, ce procès représente pour lui plus qu’un simple rendez-vous avec un juge.Mais plutôt un rendez-vous avec le sort, le sien. Depuis un mois qu’il attend. Une attente qui paraît interminable pour celui qui était venu en France sans avoir été invité pour faire fortune. Celui qui, un soir de juillet, après un match de foot devenu à la fois une référence pour les français et pour lui, candidat à la recherche de la fortune.Les comme lui on, les appelle les clandestins. Cette race de personnes  que la nécessité a transformée en chasseur de bien-être. Et qui ces raisons sont prêtes à tout pour réaliser leur rêve. Même si elles doivent défier les lois de l’occident devenues de plus en plus anti-clandestins. Des milliers comme lui ont en tête ce rêve. Celui de partir, aller à la rencontre de leur bonheur vers un horizon lointain. Son horizon à lui s’appelait la France. Djibril DIENG, était venu en France pour sortir les siens de la misère et le voilà à présent avec un procès qui trône dangereusement au dessus de sa tronche. Et lorsqu’il  se repasse la bande du thriller cauchemardesque dans le quel il est plongé malgré lui, il ne peu s’empêcher de ressentir une sensation de frustration mélangé au regret. Pour cela il sait aussi qu’il ne peut s’en prendre qu’à lui seul. Cette vieille dame n’avait rien demandé. Et si elle avait mal interprété son geste, c’était sans  aucun doute un fait inhérent à son droit de méfiance. Combien seront-ils à ne pas trouver suspect le fait qu’un noir avec un champ de cheveu sur la tête aborde une pauvre dame qui sort tout juste d’une banque. La société elle-même n’a-t-elle pas fait de ces non conviés, la source de l’insécurité dans l’hexagone ! Cette dame n’avait fait qu’éprouver une réaction normale dictée par la peur de l’étranger que les « poliques » ; incapables de résorber les problèmes élémentaires des français, ont ardemment travaillé à installer. Et puis, son copain Mohamed lui avait  prévenu que sa gentillesse lui jouerait un mauvais tour un de ces jours. Car même si Djibril avait quitté le Sénégal, il n’en demeurait pas moins qu’il continue par en garder les coutumes. Et à ce titre, il lui était impossible laisser cette vieille dame qui  était plus âgée plus que sa mère, transportée ses propres courses.Chez lui, ça ne se faisait pas. C’est  pour cela qu’il n’a pu abandonner cette dame à son sort. Á présent, il s’interrogeait sur le sien.

             Les choses s’étaient vite enchaînées, que même un mois après, il continue encore par chercher les causes profondes de son arrestation. Ce matin de fin Juillet avait tout des autres matins de travail qu’il vivait depuis quelques années. Et comme il était de coutume, il avait  respecté avec une religiosité à faire pâlir de frustration un professeur de philo, le Code de Comportement de l’Immigrer Clandestin. (CCIC) Jusqu’à ce qu’il aperçoive cette dame qui avait mal à partir avec ses courses et qu’il se découvre à vouloir l’aider. Une aide que cette dame trouva suspect et appela au secours. Djibril, paniqué, s’en fut mais le mal commençait déjà à se répandre et comme il n’arrivait presque jamais seul, une voiture de Police qui traînait dans les environs le prit en chasse. Pris au piège, à l’image d’un animal traqué, il perdit son  sang froid et la pauvre Agent de police qui tentait de l’appréhender en a fait les frais. Elle sortit de la confrontation avec la lèvre supérieure pétée, quelques bleus dans le cou, psychologiquement troublée. Il n’en faudra pas très longtemps à la police pour  découvrir que Djibril travaillait avec une fausse carte de séjour. Inévitablement l’addition s’annonce salée pour Djibril et la descente aux fins fonds de l’enfer paraissait inéluctable. La police judiciaire a accéléré la procédure et au bout de 48 heures le dossier d’accusation était bouclé. A partir de ce moment Djibril risquait gros pour :

-         coups et blessures

-         tentative de vol

-         entrée illégale sur le territoire français, faux et usage de faux

 

Pour Djibril, il y avait deux issues possibles à ce problème. Ou il se faisait expulser, ce qu’il redoutait par dessus tout, ou il se faisait  condamner à une peine d’emprisonnement qu’il devra effectuer en France, issue qui avait ses faveurs. Pour l’instant il était réduit à échafauder des hypothèses quant ce qui pourrait lui arriver. Il se dit que le fait que la flic ait été physiquement agressée pourrait pousser le juge à prononcer une peine d’emprisonnement qu’il effectuerait sur le territoire Français. Pour lui tout était bon pour éviter que la France ne lui foute à la porte. Mais là encore ce n’était que des possibilités. Encore faut-il que le procès ait lieu. 

          Après un mois d’incarcération de solitude sans visite, Djibril espère pouvoir connaître enfin  l’issue de son problème. Il était 08 heures 16 minutes lorsque son avocat fit enfin son apparition. Il comprit très tôt, à travers l’humeur son avocat commis d’office, que l’heure était finalement venue d’ aller affronter le sort ; le sien. Il avait seulement 1heure pour se préparer. Son procès était prévu pour 9heures. Il fit vite. Pourquoi faire attendre ce qui allait de toute façon se produire. Et puis il  en avait marre de ne plus savoir qui il était et encore pire qui allait-il être après le verdict. Pour un tel procès il s’attendait à ce que des journalistes soient présents. La pensée d’une éventuelle affluence médiatique commençait terriblement à le ronger. Assis dans la voiture de police qui le conduisait au tribunal correctionnel de cette ville de Provence, il réfléchissait à plusieurs  choses à la fois. Pour lui, une chose était claire : un clandestin qui envoie un policier à l’hôpital,  ne fusse que pour quelques heures, qui tente de dépouiller une vieille dame de son argent ; qui falsifie un titre de séjour, présente toute caractéristiques pour que  son procès intéresse beaucoup de monde. Car de toute manière les sans papiers,  ont toujours susciter de l’émotion, et de la commisération. Et la compassion a toujours été reconnue comme leur premier droit. Alors il ne voyait pas pourquoi sa changerait. Il s’attendait à avoir des manifestants devant le tribunal. Mais là, tout était différent. Il ne peut se permettre une médiatisation de l’affaire. Et s’il pouvait les voir à l’avance, ces associations de défenses des droits des clandos, il les supplierait de ne pas se gêner pour lui. Car il sait que partout où ses gens passent les médias s’empressent presque toujours d’être là, il ne savait  pas pourquoi et il ne voulait  d’ailleurs pas le savoir. Pour l’heure il donnerait n’importe quoi pour que ce cas de figure ne se produise pas. Parce que la France entière saurait l’affaire, et l’Afrique avec. Mohamad le lui a une fois dit, il s’en souvient encore, que l’immigration c’est une histoire aussi vieille que le monde entre la France et l’Afrique Francophone en particulier. Et dès que un immigré africain avait un problème avec la France, alors c’est toute l’Afrique qui est au courant. Rien qu’à imaginer cette affaire dans les oreilles des siens à qui il s’était toujours fait passé pour un  grand quelqu’un en  France, il avait le cœur qui rétrécissait. Il était tellement plongé dans ses pensées qu’il ne s’était même pas rendu compte qu’il était déjà arriver au tribunal.  C’est le « on  y est… » de son avocat qui l’extirpa de sa torpeur. À sa grande surprise, il n’y avait ni manifestant, ni journaliste. Pendant un moment, il failli demander à son avocat pourquoi il n’était pas là. Mais il se ravisa à temps pour ne pas paraître ridicule. Il se dit qu’après tout, il s’était sur estimé et que les longs et annueux commentaires de Mohamed sur les liens de causalités entre l’immigration et les relations France- Afrique n’étaient peut être pas à prendre au premier degré. Ce n’est que plus tard que son avocat lui expliqua que son affaire n’avait jamais été publiée et que toutes les dispositions avaient été prises pour que les médias n’en fassent pas cas de son affaire. Ce fut un  deal entre son avocat et l’accusation. C’est peut être ce qui expliquait l’extrême rapidité avec laquelle son sort fut scellé. En effet après les civilités exigées par le Code de procédure Pénale, il n’eut que 5 minutes pour s’expliquer sur les circonstances et les malentendus qui s’étaient entremêlés pour donner le résultat catastrophique qu’il vivait en ce moment. Après ce court pro domo, le juge s’était retiré pendant 15minutes pour préparer le verdict. 15 minutes au cours desquelles, son avocat n’a pas cessé de lui demander de faire confiance à la justice. Mais pour lui, cet homme en robe noir avait eu tort car, le juge à son retour annonça ni plus ni moins que l’issue qu’il redoutait le plus. C'est-à-dire l’expulsion de territoire Français dans les 48heures suivant la décision. À ce moment précis il eu une sensation de trahison. Il s’était dit qu’on ne l’avait quand même pas fait attendre un mois dans un centre de rétention pour un procès de moins de trois quarts d’heures. Mais plus les minutes passaient, plus il devenait lucide. Il comprenait avec le recul qu’il était enfin parvenu au dernier pallier de cette tour de malheur qu’il montait depuis ce matin du 27 Avril 2004. Il était prêt à éviter par tous les moyens que le piège dans lequel il se trouvait pris ne décide de la fin de la partie sans son consentement. Son honneur le lui interdisait. Ce serait de le perdre que de laisser la France le mettre à la porte. Il était venu en homme et il partira en homme. Avec tous les honneurs dus à son rang de presque rien. La partie, il l’avait commencée tout seul sans l’aide de la France et il déciderait de quand il fallait qu’il en mette fin. C’est ce qu’il s’efforçait de faire comprendre à son esprit.

                   Lui qui avait quitté les côtes chaudes et humides de la Mauritanie une nuit de Juillet 98 après avoir traversé des centaines de kilomètres séparant St Louis de Nouadhibou en Mauritanie. Escroqué à plusieurs reprises par des pseudos passeurs sans scrupules, il s’était finalement  tourné vers la filière Mauritanienne reconnue pour le sérieux et la très peu médiatisation  de ses « réalisateurs de rêve ». Mais cette énième tentative avait eu un prix. Les bijoux de sa maman et la seule parcelle que son père avait bien voulu leur laisser avant de disparaître sans que personne ne sache ce qui lui était vraiment arrivé. Ce mystère sur la disparition de son père, il ne s’en était jamais soucié parce qu’au fond elle ne changeait rien à leur existence, à lui et celle de sa mère. Pour lui, seul le rêve Français avait une importance à ses yeux. Et  il ne pouvait plus attendre. Car le bonheur n’attend jamais son destinataire. Quand ce dernier est en retard son bonheur devenait automatiquement celui d’un autre. C’est ce que sa grand-mère disait à son père. Apparemment il ne l’avait jamais comprit, alors il avait été obligé de disparaître pour ne plus assumer ses devoirs de père de famille envers trois pauvres femmes devenues veuves par la force des choses. Lui, il était décidé à suivre les conseils de sa grand-mère. En plus, les sages de son village disaient que lorsque le sort s’acharne à te dissuader d’une chose qui te tient à cœur, c’est qu’au bout de cette chose se trouvait le salut de ton existence. Ces différentes mises à l’épreuve n’étaient donc  destinées qu’à tester son endurance. Recainqué par cette pensée des sages, il s’exila en Mauritanie, pour obtenir du bonheur sa chance. Et le match de football qu’il suivît à la télévision ce soir-là lui fit croire encore plus à ses chances.  Il n’était d’ailleurs pas le seul à avoir vu dans la consécration de la France « Blanche- Black-Beure », un appel du bonheur. Des images de cette France multicolore aux anges l’aidèrent à supporter la périeuse traversée de L’Atlantique. La première épreuve survint très vite. Un maigrichon avait eu le malheur de faire une crise d’épilepsie. Très vite une majorité pour la solution du problème fut formée. Terrible, mais à l’unanimité, il fut décidé de le balancer à l’océan. Il était choqué. Mais au fond, s’était une petite de place de plus à se partager. L’agressivité et l’absence de tout sentiments de compassions étaient des  valeurs cardinales pour survivre à cette épreuve. Comment pouvait-il en être autrement lorsqu’une cinquantaine de personnes sont parquées dans une barque de 20m de longueur sur 12m de largeur. La lutte pour l’espace vital se gagne au détriment de tout ceux qui montrent des signes de faiblesse. Chacun avait son rêve à réaliser et en aucune manière il ne saurait tolérer quelque interférence que se soit.

Epreuves après épreuves, ils rallièrent enfin les cotes Espagnoles sans avoir été pris après avoir passé 3 jours sur la mer. Pour les aspirants à l’aventure Espagnoles, le voyage était terminé. Mais pour  Djibril et deux autres passagers,il fallait patienter encore avant de voir la France. Le reste du voyage se fera en voiture et dépendait du bon vouloir des automobilistes. L’entreprise était risqué mais ils ne contaient pas abandonner en si bon chemin. Et puis au bout, à quelques kilomètre de là où ils se trouvaient, il y avait la France, leur rêve.

Pour une nouvelle fois, la chance semblait les avoir déroulé un tapis de fourrure infini. Il n’eut pas à attendre longtemps avant que le « taxi » qui allait les conduire en France ne pointe le bout son né. Ce monsieur Dunos était vraiment un ange dans un camion. À lui seul, il les avait conduit jusqu’en Provence. Avec en prime un « nous y voilà les aventuriers… ». Le voyage s’était déroulé sans encombre. C’est à croire que cette nuit-là France les attendait. Ils y étaient vraiment. À présent, chacun devrait aller jouer sa chance en solo. Pour Djibril le premier acte de la pièce qu’il allait commencer à écrire consistait en un coup de fil. Il devait appeler un certain Mohamed dont son oncle lui avait parlé. C’est désormais lui qui allait s’occuper de sa tronche de clandestin. Il sortit le numéro qu’il avait soigneusement emballé dans un sac en  plastique pour éviter que le papier ne se mouille au cours de la traversée. Mais à peine avait-il entré sa tête dans la cabine publique qu’il se rappela qu’il lui fallait des pièces pour appeler. IL se souvint que son oncle lui avait dit que les blancs n’utilisaient pas la même monnaie que les noires. Il comprit que ses pièces de CFA ne servaient plus à rien. Il se décida malgré lui à en demander au premier venu. Le premier venu ne s’étant même soucier de son « pardon monsieur…. », Il dut attendre le deuxième. Ce fut le bon ou plutôt la bonne. La jeune femme lui donna deux pièces de un euro avant d’ajouter « faites pas cette tête ; mon frère, il en manque toujours à chaque fois qu’il doit appeler dans une cabine publique. ». Il mit une pièce de 1euro dans l’orifice à pièce et composa le numéro. Il entendit deux bips et enfin un homme répondait :

 -Oui ! C’est à quel sujet ?

 -Je veux parler à Mohamed, dit-il.

-De la part de qui ? Lui demanda la voix.

-Je suis Djibril de St Louis. On m’a dit d’appeler Mohamed dès que je viens fit-il avec une certaine conviction qui faisait apparaître son enthousiasme.

- C’est moi Mohamed. Djibril dis-moi où tu te trouves et je viens te chercher tout à l’heure, lui répondit Mohamed.

-Je suis dans une cabine téléphonique à coté d’une statut d’un homme en…

 Il n’eut pas le de terminer sa description quand Mohamed le coupa :

-Je connais là. Avant d’ajouter :

-Ne bouge pas de là, je viens dans quelques minutes.

Il raccrocha le téléphone et sortit de la cabine. Il se mit pour, passer le temps à contempler  toutes ces merveilles architecturales qui l’entouraient. Ces belles rues, ces bels immeubles … elles n’avaient rien avoir avec son St Louis natal. Tous ces gens qui passaient sans vraiment faire attention à lui, le noir. Autour de lui tout était blanc comme les habitants eux-mêmes. Personne ne semblait le remarqué. Ce qu’il n’avait vu qu’à travers un écran de télé était à présent à porter de main. Il était en France. Oui, en France. Il était n France comme Claude MAKELE ; En France comme Zinédine ZIDANE ; En France comme le seul mec que le bonheur attendait. Mais très vite il se souvint de l’objet de son arrivée et  là, l’euphorie du tourisme sentimental disparu d’un coup. Il ne faut pas oublier d’où on vient, ça empêche d’oublier pourquoi on est là. À cet instant, Mohamed se présenta. Ils se saluèrent rapidement et prirent la route pour le logement de Mohamed. Le logement de Mohamed était un petit appartement qu’il partageait avec deux autres personnes, un béninois et un malgache pour leur part en règle. La vie à la planque, nom que Mohamed donnait à leur appart occupait une infirme partie dans la vie de Djibril ; le plus claire de son temps, il le passait sur le chantier de construction de 8h à 18h, et à la plonge du restaurent « le palais », de 19h à 23h 30 il rentrait toujours à l’appart à minuit. Il avait donc juste le  temps de dormir pendant 8h avant de recommencer sa journée. Il s’était promis de racheter une parcelle à sa mère, d’honorer de nombreux engagement et aussi de participer au loyer de l’appart. Pour toutes ses dépenses, il ne pouvait pas se permettre de se contenter d’un seul travail avec un salaire perfusion. Et puis il fallait de temps en temps envoyer des cartes postales à sa famille pour faire bonne impression. Il y va de la crédibilité de la nouvelle vie qu’il était   supposé avoir. Mais voilà que ce matin, ce maudit matin était venu plomber ses espoirs. Le voici à la merci des agents de sécurités qui avaient 48h pour se débarrasser de lui. Mais il n’entendait  pas se laisser faire. Il avait son honneur à défendre et pour cet honneur il allait choisir le sacrifice extrême. U n moment d’inattention des agents de sécurités il s’est balancé de la fenêtre de l’immeuble du palais de justice. Il avait juste le temps d’entendre son je suis désolé

Malheureusement pour son honneur, la distance n’était pas assez pour que la chute soit mortelle. Il était tombé du 2èm étage. Il étais toujours vivant même s’il ne pouvait plus plongé cette malheureuse voiture a été là pour amortir la chute, pour le garder envie encore ……..

Quelques heures plus tard le diagnostic tombe il ne marchera plus! Pour lui c’est dur l’équation se complique comment allait-il faire pour se suicider non seulement il supporterait pas une expulsion honteuse mais il supporterai encore mal de d’être condamner a passer le restant de ces jours dans un fauteuil roulant. Il avait à présent deux raisons de mettre fin à ses jours. Je suis venu en France pour faire fortune non pour perdre mes pieds

A l’extérieur de l’hôpital où il était admis depuis sa tentative de suicide, le temps poursuit son inlassable évolution. A l’intérieur, pour Djibril DIENG clandestins Sénégalais en France le temps s’est arrêté surveiller étroitement par un policier il voit mal comment il réussirait a mettre fin à ses jours pour éviter la honte et le déshonneur

A mesure que le passait, il perdait l’estime de soit il se sentait inutile ces légendes de compassion qui seul, donnaient encore à son quotidien pitoyable dépendante un air d’échec. Il avait l’impression de n’être plus qu’une tache du passé dans le présent. Une tache qu’il est décidé à priver de futur. Il étais censé sortir les siens de la misère, leur crée des rêves. Mais dans sa situation présente il était pour les siens un déshonneur, un échec et pour la France un indésirable, juste bon pour faire passer les statiques d’expulsions de n à n+1. Et puis à l’extérieur de son nouveau monde, personne ne semble se préoccuper de son sort. Même Mohamed et ses colocataires n’ont jamais donné signe de vie. Normal, personne ne veut avoir d’histoire. Bientôt, cette nuit il aura passer deux nuits sans perfusion dans cette chambre d’hôpital toujours pas de relâche dans la surveillance. Ces nuits qu’il passe désormais sous calmant. Et bientôt sa troisième nuit dans un lit d’hôpital, mais le diagnostic du Docteur Merlieux cette nuit, lui fit comprendre qu’il n’avait plus le temps. Il devait en finir cette nuit. Parce que le lendemain matin il sortira dans un fauteuil roulant et là il lui sera difficile de se donner la mort. Il a été très persuasif  avec l’infirmière. Le calmant, il s’en passera cette nuit. Pour cela il simula un sommeil profond. L’infirmière n’eut d’autre chois que de repartir et ses comprimés endormant. Il sonnait 02h15 lorsqu’il jeta un œil sur l’horloge de sa chambre avant de s’acquitter de son devoir. Cette fois, il mit la volonté pour ne plus être repéré. Il s’est ouvert une veine sur ses deux bras en se servant de l’épingle en plastique de la perfusion. Il regardait ses deux bras crachés le sang de tout son corps dans un rythme effréné. Au fur et à mesure que le flot continue du sang perdait de l’intensité il se sentait de plus en plus faible. Il respirait avec labeur. Son souffle s’en allait à petit pas. Il ferma les yeux quelques secondes avant de les rouvrir pour un dernier regard autour de lui. Pendant ces quelques secondes que durèrent son regard, il vit défiler sous ses yeux l’histoire de sa courte existence. Lui Djibril  DIENG âgé de 29 ans ; venu en France à la rencontre du bonheur que son destin avait selon sa croyance voulu terrer dans ce pays lointain où les gens semblent avoir perdu leur âme d’humain. Le voilà à présent sur un lit de d’hôpital après avoir perdu et ses rêves et ses pieds. Aussi ne pu-t-il s’empêcher de faire le parallèle entre son histoire et  celle de son  grand père. Cette coïncidence ne lui échappa pas. Dans quelques heures, la France et le monde entier célébreront la 60è anniversaire du débarquement qui a libéré la France de l’horreur de l’occupation. Triste coïncidence que de voir que 60 ans plutôt son grand père débarquait le 15 Août sur les cotes de Provence 3 mois après le débarquement en Normandie, pour libérer la métropole des soldats de l’Allemagne Nazi. A première vue, cette cause n’était pas la sienne et portant il s’était battu pour qu’elle triomphe pour que la France reste au Français. Mais au delà de toute considération régionales et territoriale, il s’était battu pour que l’humanité ne succombe pas à la tentative de la catégorisation raciale que l’idéologie Nazi s’efforçait de faire triompher. Des centaines de milliers comme lui ont payé de leur vie pour que l’horreur de l’esclavage qu’ils ont  pendant 4 siècles ne se répète. Ces gens là qu’on a traités par la suite comme de la merde, ont donné une belle leçon de solidarité et d’humanisme au monde. C’est vrai que tout est partie d’une contrainte et que les choses ne les avaient pas laissées le choix mais nul ne peu et ne pourra jamais mettre en doute leur profond engagement pour cette cause. Un engagement qui a valu à son grand-père ses deux jambes et traitement de mépris par la suite. Il échappa aux massacres de Thiarroye de très peu.  Sa malheureuse pension lui suffisait à peine à nourrir ses nombreux enfants et ses trois épouses. Il mourut sur ses propres terres sans la reconnaissance de la France en laissant derrière lui ses jambes sur le territoire Français.

60 ans plutard, son petit fils, venu en France, pour récolter et  procurer du bonheur  à sa famille, et récolter les fruits de ce que son grand père s’était tué à garder libre, se trouvait à présent sur le chemin de  l’au-delà. Il n’a rien trouvé mais il a tout cherché…

Il ne demandait que la reconnaissance, l’acceptation mais il n’u fut rien. Alors il a refusé la pitié et la compassion condescendante qu’on lui jetait. Comment aurait-il pu accepter rentrer au Sénégal dans ces conditions. Il n’était plus un homme juste un morceau de chaire et d’os  qui deviendrait pour les siens un fardeau, une charge. Il serait tombé très bas. Lui, le Français qui serait devenu un ordinaire sénégalais qui ne vivrait plus que de la charité des autres. Cette vie-là il la connaissait pour l’avoir vu dans las rues de St Louis. Tous ces handicapés qui traînaient à longueur de journée dans les rues tendant leurs bols aux passants. Non il ne pouvait pas vivre cette vie-la. Il n’était pas question de rentrer dans cet état. En plus qu’aurait-il pu dire à sa mère quand elle lui demanderait son l’argent de sa maison. Et à Ousmane, son cousin quand il lui demandera ses crampons de football. Á Tante Awa, il dira quoi si elle lui demandait ses « Jeans Mariah CAREY ». Encore pis qu’aurait-il pu dire à sa nièce Salma quand elle serait venue récupérer ses CD  dédicacés de Diam’s. Il y avait trop d’enjeux pour qu’il accepte de rentrer sans rien. La seule solution, c’est celle qu’il avait déjà appliquée. Et il ne regrettait rien de son choix sauf qu’il aurait aimé dire à sa mère combien il était désolé que les choses se terminent ainsi. Entre la honte et le déshonneur et il n’en a choisit aucun.

Après ces quelques secondes de flirt avec sa pensée, il rendit son dernier soupir avec un souri de satisfaction. De cette nuit de 98 où il débarqua en France à cette nuit de 2004, les choses avaient  évolué. Il a su s’adapter à cette évolution. Il avait eu un temps pour rêver et un autre pour affronter la réalité. Il ne s’était pas dérobé. Il a assumé comme un homme.

Très tôt le matin, l’infirmière ne pu que constater les faits, le triomphe d’un homme qui n’avait plus de raison de faire partir des 5 milliards d’êtres de cette terre.

Quelques jours plus tard,  sa dépouille fut rapatriée  à Dakar avant de rejoindre St Louis pour y être inhumé comme il se devait. Cet aller simple avait fini par le retrouver. Mais ce fut lui qui décida. Il est resté maître du jeu jusqu’à la fin. Pour ses parents la France avait tué et volé leur enfant. C’était mieux ainsi. Personne dans ce pays ne sut les vraies raisons de ce suicide. Quand au procès, il n’avait jamais été mentionné nulle part ailleurs.

Ainsi se termina l’histoire de Djibril DIENG un clandestin Sénégalais partir en France à la recherche de son bonheur…….

 

     Il faisait partie de cette grande misère du monde, produit de l’échec des politiques nationales et internationales de développement. Cette frange de la population mondiale réduite à servir de statisques pour les Organisations internationales de tout genre. Cette même frange contre laquelle les législations occidentales ne cessent de fabriquer des lois de plus en plus déshumanisées et répressives. Cette misère du monde que la France ne saurait accueillir……..

 

   

 

 

 

          

    

      

 

    

          

       

             

 

 



17/06/2008
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